lundi 19 mars 2012

Milan - San Remo

Traditionnellement, pendant des lustres, la première grande Classique de la saison cycliste se déroula le 19 mars (avec néanmoins quelques exceptions à la règle). Puis elle fut au calendrier le samedi suivant l'arrivée de Paris-Nice, c'est à dire entre le 15 et le 25 mars.
Samedi 17 mars 2012, la Primavera a été courue de l'autre côté des Alpes, un Australien, Gerrans, a remporté cette édition  au sprint, dans l'indifférence quasi-générale des médias français : le cyclisme n'est plus ce qu'il était...

Alors je me suis replongé dans mes archives pour retrouver les vainqueurs des joutes d'antan. 
J'ai commencé par sortir la "boîte" des "Archives photographiques du cyclisme" que les éditions Miroir Sprint publièrent au début des années 1980 et plus particulièrement le coffret consacré aux Classiques (Il y en eut également un pour les grimpeurs et deux pour les vainqueurs du Tour de France) . Une quarantaine de photos, superbes, agrémentent l'ouvrage dont quatre illustrent Milan San Remo et le livret d'accompagnement est écrit par Eddy Merckx lui-même, 7 fois vainqueur de la classique italienne !
Eddy Merckx vainqueur pour la cinquième fois en 1972 ; Photo Archives photographiques du cyclisme 
Entrons dans la machine à remonter le temps pour égrener les souvenirs au gré des Miroir Sprint et des Miroir du cyclisme jusqu'à la fin des années Merckx...
Je donne tout d'abord la parole au Patron !

Milan-San Remo : le Poggio libérateur
Pour plusieurs raisons, Milan-San Remo est une course très particulière. A la mi-mars, peu de coureurs sont prêts à couvrir trois cents kilomètres. La « Primavera » est, en effet, la classique la plus longue de la saison, et elle arrive alors que la plupart des coureurs se trouvent encore en période de rodage. De deux cho­ses l'une : ou bien la course se traîne gentiment jusqu'aux abords de l'arrivée, ou bien elle se déroule sur un rythme élevé avec des accélérations brutales. Dans le premier cas, n'importe qui peut l'emporter ; dans le deuxième, elle ne peut revenir qu'à un cou­reur déjà en pleine possession de ses moyens. La dis­tance constitue la seule véritable difficulté de l'épreuve. Le Poggio fait le reste. Depuis son installa­tion en fin de parcours, je crois qu'il n'y a jamais eu de sprint massif sur la Via Roma. En soi, ce Poggio n'est pas un obstacle très redoutable. Avec mes équipiers je l'ai franchi des dizaines de fois à l'entraîne­ment... avec le sourire. Son intérêt vient précisément du fait qu'il figure après deux cent quatre-vingts kilo­mètres. Au pied du Poggio presque tout le monde manque de fraîcheur. Il appartient dès lors aux hom­mes forts, à ceux qui ont conservé des réserves intac­tes de durcir la course au maximum durant la trop courte ascension. Par expérience je dirais cependant qu'il est exclu de pouvoir faire la différence dans la montée. C'est après le sommet que tout se joue. Il importe de négocier les virages avec virtuosité pour s'engager dans la traversée de San-Remo dans les meilleures conditions. Au bas de la côte il faut encore parcourir deux kilomètres. Tout reste possible dans les rues de San-Remo. Ma victoire de 1975 est tout à fait significative à cet égard : ce n'est qu'à mille mètres de la ligne que j'ai rejoint les premiers. Et pour couronner ce final tortueux, il y a la longue ligne droite de quatre cents mètres, beaucoup plus dure qu'on l'imagine, car la Via Roma est en légère montée.
Il faut être terriblement costaud pour tirer le 52 X 13. Je dirais volontiers que pour un coureur au sommet de sa condition, en pleine possession de ses moyens, Milan-San-Remo est la classique la plus facile, compte tenu d'une opposition encore balbu­tiante en début de saison. Pour la préparer rien ne vaut Paris-Nice. Chaque fois que j'ai gagné à San-Remo je sortais de Paris-Nice. Sans doute y-a-t-il le ris­que de refroidissement car Paris-Nice se déroule sou­vent sous un climat déplorable mais la compétition y est beaucoup plus sévève qu'à Tirreno-Adriatico. On y vit six journées de vraie course, ce n'est pas le cas aux « Deux Mers ».
Que le vélo semble facile quand il est expliqué par un tel champion...
1928
Photo Archives photographiques du cyclisme
Costante GIRARDENGO, remporte à 35 ans son sixième Milan San Remo. Sur cette photo, le premier campionissimo est encadré de deux autres champions italiens, Guerra (à droite) et Binda.
1951
Photo Archives photographiques du cyclisme
Louison Bobet file vers San Remo pour remporter sa première grande Classique, suivi par son équipier et ami Pierre Barbotin.
1959
Photo Miroir Sprint
Les attaquants sont Français ou Italiens...
Photo Miroir Sprint
Le vainqueur est le sprinteur espagnol Poblet...
1960
Photo MdC
Le Français René Privat accroche à son palmarès son plus beau fleuron.
1961
Photo MdC
C'est la révélation du jeune Poulidor...
1962 : il y a 50 ans !
Photo Miroir Sprint
Tout le monde attend le champion du monde Rik Van Looy qui passe une bonne partie de la journée à musarder en queue de peloton.
Photo Miroir sprint
Peloton qui attend le final pour en découdre.
Photo Miroir sprint 
A ce petit jeu, le jeune Belge Emile Daems est le plus fort. Il rejoint tout d'abord Bailetti, parti en éclaireur.
Photo Miroir sprint
Il lâche facilement l'Italien...
Photo Miroir Sprint
...pour remporter, voici 50 ans jour pour jour, une bien belle victoire.
1963
Photo MdC
La photo finish départage Joseph Groussard (vainqueur d'un boyau...) et l'Allemand Wolfshohl. Les Français savaient gagner en ce temps-là !
1964
Photo A.P.C
Tom Simpson, l'élégant British inscrit la Primavera à son palmarès.
1965
Photo MdC
Le Hollandais Den Hartog, équipier d'Anquetil, bat les Italiens qui n'ont pas gagné à San Remo depuis 1953 !
1966
Photo MdC
La première victoire du Cannibale ! En 1966, il portait le beau maillot Peugeot. Sur cette photo, il est à l'attaque avec Poulidor (qui terminera 7ème).
1967
Photo MdC
Bis repetita !
Trois Italiens, Motta, Bitossi (celui qui rajoute "rage"... a un gage !) et Gimondi le suive. 
"Tous derrière et lui devant..."
... L'Italie s'impatiente !
1968
Photo MdC
Rudy Altig venge son compatriote Wolfshohl. Poulidor est encore dans le coup !
1969
Photo MdC
Et de trois pour le roi Eddy : 1969, année érotique... mais surtout MERCKXIENNE !
1970
Photo MdC
ENFIN :17 ans que l'Italie attendait cela ! Michele Dancelli succède à Loretto Petrucci, vainqueur sur la Via Roma en 1952 et 1953.
1971
Photo MDC
Cela devient une habitude, la quatrième victoire de Merckx. Il porte maintenant le maillot de la Molteni, entreprise qui fabriquait, je crois de la charcuterie.
1972
Je ne republie pas la photo de la cinquième victoire de Monsieur Eddy Merckx et je ne résiste pas à montrer ce dessin paru dans le Livre d'or 1972 du Miroir du cyclisme .
1973
Photo MdC
Le grand rival de Merckx sur les classiques inscrit son nom au palmarès de Milan San Remo, il récidivera !
Voici ce qu'écrivait Merckx à son propos dans le texte cité ci-dessus:
"Nul ne niera que De Vlaeminck possédait une classe extraordinaire. Il a gagné quatre fois Paris-Roubaix mais aussi Milan-San Remo et le Tour de Lombardie, le Tour des Flandres et Liége-Bastogne-Liège. C'est l'adversaire le plus talentueux que j'ai rencontré dans les classiques. Pourquoi n'a-t-il jamais réussi à briller dans un Tour de France alors qu'il s'y est présenté plusieurs fois au mieux de sa forme ?"
1974
Photo MdC
Un Italien revêtu du maillot arc-en-ciel vainqueur sur la Via Roma, les tifosi sont au pâmoison !
1975
Photo MdC
Merckx devant Moser pour une sixième victoire.
1976
Photo MdC
La dernière grande victoire du cannibale :
 Chapeau, Monsieur !
(A suivre...)

1 commentaire:

  1. Merci pour votre passionnant reportage sur Milano-Sanremo :-)

    RépondreSupprimer