jeudi 31 mars 2011

Ma petite école maternelle...

En ai-je déjà parlé ici ? Je m'en souviens plus très bien... mais comme je viens de retrouver un vieil article du "Télégramme de Brest" que ma maman conservait précieusement dans une vieille boîte en fer de galettes bretonnes, bien sûr...
 Si ce trophée familial est parvenu jusqu'à moi, c'est que j'y suis en photo !
Je suis à gauche à côté de mon cousin Alain : Je suis certain que ma tante Yvonne possède le même document dans une vieille boîte en fer...
L'article qui doit dater de 1962 ou 1963, est fort instructif :
A   l’avant-garde de l’éducation moderne l’école maternelle de Saint Cado à Belz : un véritable musée d’art pictural

SAINT-CADO, EN BELZ, UN PETIT VILLAGE AU BORD DE LA RIVIERE D'ETEL, 1.000 HABITANTS, DES MAISONS QUI SE PRESSENT SUR UNE LANGUE DE TERRE, TOUT PRES DU PONT LOROIS, EN CE CE PAYS ESSENTIELLEMENT MARITIME, D'OU TOUT VIENT DE LA MER, UN EVENEMENT, NON PAS REELLEMENT ACTUEL, MAIS QUI EST EN TRAIN DE PORTER SES FRUITS.
A l'entrée du village, au milieu des maisons de pêcheurs, s'élève une école maternelle, petit bâtiment mo­derne, entouré d'un Jardin. Il n'y a pas d'école primaire à Saint-Cado, il faut aller à Belz, distant de 2 kilomètres environ. Le problème sco­laire reste entier en ce coin du Mor­bihan, cependant cette petite école est connue. On y fait quelque chose d'inhabituel.
Depuis 6 ans: une école moderne
fi y a plusieurs années, Mlle Robic sortait de l'école normale de Quim-par. Jeune institutrice, elle apprit l'existence de la méthode Freinet, prometteur de l'école moderne. Ella rut l'occasion de faire un stage dans une de ces écoles. Elle fit par la suite un séjour d'un an à l'école Freinet, à Vence. Appelée à diriger les des­tinées de cette petite école, Mlle Robic décida de mettre en pratique cette méthode.
Rappelons que Célestln Freinet est cet Instituteur qui, à la fin de la première guerre mondiale, a inau­guré cette méthode " naturelle". Depuis de longues années, il a été suivi par de nombreux adeptes dans le sein de l'Education nationale, an particulier dans le Finistère et les Côtes-du-Nord. Depuis six ans. Mlle Robic a institué cet enseignement, quelquefois qualifié de révolution­naire, parfois décrié, faisant sourire et qui, cependant, apporte des ré­sultats extraordinaires.
Une scie, des pointes un pinceau
L'enfant, dès son tout jeune âge, doit, ou plutôt veut se mettre au diapason des grandes personnes qui l'entourent. Notons d'ailleurs à ce sujet les jouets que l'on peut lui donner et qui, bien souvent, ne l'amusent pas du tout : une pano­plie de Martien, ce n'est pas toujours attirant. Fermons cette paren­thèse, qui pourrait faire l'objet de longues polémiques. La constatation première de la méthode naturelle est que l'enfant apprend, se cultive d'une manière empirique. La Science avec un grand S n'est que l'aboutis­sement de ces tâtonnements. Aussi pourquoi ne pas donner à cet enfant de 2 ans ou de 4 ans la possibilité immédiate de se mettre au contact des réalités ? Ce n'est pas tout à fait l'Emile de J.-J. Rousseau, mais il y a de cela. Dans cette école de Saint-Cado, pas de Jouets, pas de longues récréations, pas de grands cris et de pleurs d'enfants réclamant leur mère. Des outils, des modernes, une succession et grande diversité de petits ateliers - où le jeune élève s'ébat en toute liberté. Sur de petits billots, des marteaux, des scies, des boites de pointes, des morceaux de bois, des bambins de 2 ans confectionnent à leur idée des, autos, des tables et toutes sortes de petits meubles . Les notions d'assemblage et de construction leur viennent tout naturellement.
Pourquoi des lignes de A ?
Il semble logique d'envoyer ses enfants à l'école pour y apprendre à lire, écrire et compter. Le bambin de Saint-Cado ne montre pas à ses parents le soir en rentrant des cahiers où s'alignent à longueur de page des voyelles, des b. a. ba. L’en-fant saura lire, il saura parler, il saura compter, mais sans pour au­tant demeurer les bras crolsés et bien sage assis à une table.
« J'ai  deux  pigeons »
« Mon parrain est parti Ce ma­tin », c'est la confession d'une gamine de trois ans et l'on sent que ce départ a eu de l'importance dans la vie affective de la petite.
« Moi, dit Daniel, j'avais 6 pigeons, un rat les mange tous les Jours, il ne m'en reste plus que deux », cela aussi est important dans la vie de cet enfant. Ce sera le sujet de la leçon  (le mot n'est pas exact) d'écriture de la matinée. Mlle Robic demande  à toute la classe quelle phrase il faut écrire au tableau. Un petit vote à main levée, c'est la seconde qui est retenue par la majorité et laimaîtresse écrit au tableau « vert » ce qui chagrine le petit Daniel « J'ai deux pigeons ». Ces trois mots vont être composés par les enfants en caractères d'imprimerie, aussitôt fait, on peut se mettre à tirer des épreuves, dont les meilleures seront emmenées à la maison.
Ici c'est ma copine Françoise qui imprime quant à l'autre enfant...


De jour en jour les enfants, à l'aide de ces  petites phrases, apprennent les lettres, les ensembles de lettres et finalement savent lire.

La parole, le dessin le chant
Nous   disions   tout   à   l'heure   queI l'enfant  se  modèle  sur l'adulte,  sur les   grandes   personnes   qu'ils   volent évoluer    autour    de    lui.   Le    grand mode   d'expression   de   l'enfance   en plus   des  balbutiements  et   des   cris, c'est le dessin, que l'on a longtemps voulu  comparer à  des  graffitis  sans signification.
La grande salle de l'école de Saint-Cado volt ses tables recouvertes de feuilles a dessin, des palettes à couleurs sont disposées, des boites de pinceaux sont préparées et le Jeune artiste peut selon son inspiration, peindre ce qu'il veut. "C'est une dame sous  la pluie". « C'est la maison du soleil », « C'est la lune », etc... Après la réalisation de son travail, l'enfant désigne à l'institu­trice le sujet de sa peinture. Toutes les œuvres juvéniles vont aller garnir les murs de la classe.
Le   magnétophone   a   fait  une   en­trée   discrète   dans   l'école,   ce   n'est pas   ici   un   appareil   mystérieux intouchable, la maîtresse en a montré   une   fois   le   fonctionnement. Depuis   les   enfants   le   mettent marche,   parlent,   chantent,   promènent dans la salle le micro au bout d'une rallonge de 15 mètres ;  toute la   création   enfantine   est   dans ces chants,    ces   longues    mélopées   où    l'on    retrouve les rythmes   de   la   musique   folklorique  et   pour   tout   dire   de   la   musique primitive.
Tous les modes de la création artistique vont avoir dans cette école la possibilité de s'exprimer, le chant enfantin a vu sa consécration l'an dernier.
A  suivre
J.-C. HASCOET
Je ne possède pas la suite de cet article, je ne devais pas être en photo ! 
Si je suis un pur produit de la pédagogie Freinet, je n'en garde aucun souvenir, aucune trace visible.
Je ne me souviens pas de Mademoiselle Robic même si ma mère en parlait souvent : elle avait laissé un très bon souvenir à Saint Cado.
Je crois pourtant me rappeler :
- de promenades au bord de la mer, 
- de visites à la ferme des parents de mon copain Eric Le Gall, je suis certain que j'avais peur des vaches ;
- d'une histoire où ma voisine Viviane parlait de "Ma jupe, ma jupe a des bretelles" (Cela nous fit rire longtemps, mais pourquoi donc ?), peut-être ce texte fut-il imprimé par nos soins ?
- de mon copain Yvon qui s'était cogné la tête au radiateur en fonte et qui avait beaucoup saigné,
- de ma copine Isabelle avec laquelle je ramassais la galce dans les trous d'eau pour en faire... je ne sais quoi !
- de mes deux copains "Gros Gilles" et "Petit Gilles" (le Daniel de l'article ne peut d'ailleurs être que le frère de Petit Gilles)
- et de mes courses à vélo sur mon  premier vélo avec mon cousin Yvan...
Aujourd'hui ma petite école maternelle est une maison d'habitation tout comme l'école maternelle "libre" qui était juste en face. Et oui, en ces heureuses années, notre petit village breton (Saint Cado, petit village, habité par des sauvages !) possédait deux écoles maternelles : une école laïque, la mienne, appelée par les "autres" l'école du diable, et une école libre, que nous appelions l'école des curés ! 

1 commentaire:

  1. Moi aussi je suis un de la laïque ! Que reste-t-il de Freinet et de son imprimerie aujourd'hui, à l'heure de l'informatique? Que reste-t-il de Montessori ou de Summerhill ? Mais pour moi Etel, c'est sa barre, un sacré morceau où l'équipe de Bombard y a laissé sa peau... Merci pour cette évocation bretonne.
    Heffe, hussard noir de la république.

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